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II/Quels risques sur l’environnement ?
 
Ø      L’Homme directement touché
 
 
L’homme, dans de telles entreprises, peut être directement touché. En effet, dans le cas du barrage de Tignes, c’est un village entier qui a été « noyé » pour la construction du lac de retenue ! Le village a été entièrement dynamité, perdant ainsi un patrimoine important…
 
Aujourd’hui même, tous les 10 ans, lorsqu’EDF réalise la vidange du barrage (que nous verrons plus tard), des centaines de personnes viennent en pèlerinage sur les bords de leur ancien village…
 
 
Ø      La sédimentation
 
La construction d’un barrage, nous l’avons vu dans la première partie, demande la construction du lac de retenue. Or, l’eau des rivières qui est reçue, se charge au long de son parcours de nombreux sédiments, qui se retrouvent piégés dans le lac de retenue…
 
On définit l’érosion spécifique, c'est-à-dire l’érosion moyenne d’un versant, par la formule
 
em = 1/ST
 
Avec em  l’érosion moyenne, S la superficie du bassin, et T la durée conventionnelle (1 ans dans ce cas)
 
Or, dans le lac de retenue, l’érosion spécifique moyenne de la formule devient négative. Autrement dit, au lieu d’avoir érosion, nous avons sédimentation. Et cette sédimentation est sélective, puisque les éléments lourds se déposent surtout à l’entrée du bassin, alors que les éléments fins mettent plus de temps à se déposer.
A l’aval du barrage donc, l’eau rejetée est moins chargée en sédiments, elle a donc un pouvoir érosif plus fort, et va modifier les rivières, et la biodiversité, que nous verrons plus loin…
 
 
Ø      La biodiversité
Tout d’abord, un barrage condamne la flore et la faune de toute la surface du lac de retenue.Puis, il transforme un système d’eau courante en un système d’eau dormante, modifiant la composition des peuplements végétaux et animaux du cours d’eau :
Mais aussi, comme nous l’avons vu plus haut, les sédiments sont retenus dans le lac de retenue, créant une eutrophisation de l’eau :
On désigne eutrophisation, mais certains scientifiques préfèrent utiliser le mot dystrophisation, un phénomène qui se développe sur un temps très court de quelques années à quelques dizaines d'années suite à un apport excessif d'éléments nutritifs.
Elle affecte de préférence les eaux closes ou à faible renouvellement (c’est le cas du lac de retenue d’un barrage) mais aussi les cours d'eau à courant lent et certaines zones côtières. La présence de phosphore en excès est la cause principale de l'eutrophisation. En conditions normales le phosphore est un élément rare dans le milieu aquatique terrestre ce qui limite le développement des algues et des végétaux.
L'eutrophisation se traduit d'abord par une modification de la composition de la flore au niveau des algues et éventuellement des macrophytes. On observe une réduction de la diversité des espèces présentes, et la prolifération de certains groupes d'algues. La prolifération de la matière végétale en suspension diminue la transparence de l'eau. Certaines espèces proliférantes peuvent libérer des toxines dans le milieu. La décomposition de la matière végétale morte accumulée sur le fond provoque un abaissement spectaculaire du taux d'oxygène disponible dans les eaux profondes et libère de l'ammoniac. Le schéma ci-dessous explique le phénomène de l’eutrophisation.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
I/Pollution de l’eau à cause des sédiments
II/Prolifération des algues
III/Décomposition anaérobie (l’oxygène de l’eau est capté par les sédiments au fond du bassin)
IV/D dégradation du milieu (taux d’oxygène en baisse, plus d’espèces vivantes)
 
 
 
 
 
 
 
On a calculé que l'apport d'un gramme de phosphore dans un milieu eutrophisé, se traduit par la production de 100 g en poids sec d'algues dont la décomposition consommera 138 g d'oxygène. !
 
 
Or, cette eau chargée de nutriments, et très faible en dioxygène ne permet pas la vie des poissons ! Elle détruit donc un écosystème en aval du barrage, et rend l’eau impropre à la consommation ! En outre, en amont du barrage, elle dégrade la zone de retenue d’eau, en l’envasant…

 

Ø      La vidange d’un barrage
La vidange consiste à retirer tout ou partie de l’eau stockée par ouverture des vannes de fond du barrage. Cette opération remet en suspension dans l’eau une partie des couches superficielles des sédiments déposés dans le lac depuis sa mise en eau. Les concentrations de matières en suspension (MES) augmentent alors temporairement dans la rivière, en aval du barrage, en y provoquant des déficits d’oxygène dissous et en y apportant des éléments indésirables en excès (ammoniac, fer, manganèse, phosphore, parfois métaux lourds et pesticides). Cet ensemble de changements des caractéristiques physico-chimiques du milieu est de nature à gêner certains usages de l’eau, comme par exemple la production d’eau potable.
Des études ont permis d’identifier trois phases possibles de fortes concentrations de matières en suspension dans la rivière, à l’aval du lac :
- la première, de courte durée, apparaît parfois au moment de l’ouverture des vannes de fond, ce qui correspond à l’élimination du cône d’envasement proche des vannes.
- la deuxième, généralement de plusieurs heures, survient en fin de vidange proprement dite, lors de l’évacuation des toutes dernières réserves d’eau du lac.
- la troisième concerne toute la période qui suit, pendant laquelle le lac est à sec. Le débit entrant s’encaissant dans les vases déposées dans l’ancien lit et les pluies lessivant les sédiments mis à nu, la circulation de l’eau dans le lac est capable dans certains cas de provoquer épisodiquement des pics de matières en suspension dans l’eau de sortie. Un moyen de limiter l’importance de cette troisième phase est de se placer en période de faible hydraulicité, c’est-à-dire lorsque les débits d’entrée dans le lac sont faibles car, comme nous le montre le graphique ci-dessous, un fort débit d’entrée lié à une forte pluviosité provoque un important pic de concentration de matières en suspension à l’aval du lac.

 

 

moyenne journalière des concentrations en M.E.S. (mg/l) dans l'eau à la sortie du barrage de Guerlédan entre le 26 août et le 15 novembre 1985 (d'après Gosse, 1991).